Pas plus tard qu’aujourd’hui, un grand hebdomadaire français a publié, sans honte aucune, un article faisant l’éloge inconditionnel d’un nouvel arrivant dans le monde des « applis iPhone ». L’application, géniale au demeurant, et disponible aussi sur Androïd, permettrait de « trouver des cigarettes à toute heure du jour et de la nuit, c’est super! », écrit le journal d’information.
Que l’application soit « géniale au demeurant », comme l’affirme le journaliste, on en conviendra. Mais c’est un véritable problème d’éthique journalistique qui se pose ici, bien que l’appli constitue en soi une véritable avancée sociale, voire un nouveau service public. La liberté d’information de millions de lecteurs est mise en danger par le comportement simiesque d’un directeur de rédaction irresponsable. Celui-ci, interrogé, s’est contenté de se gratter la tête, le regard vide, puis de pousser un long cri, entre hurlement et gémissement, tout en se frappant la poitrine avec énergie, dans une impressionnante démonstration de virilité à la fois moderne et sauvage.
ClopClop, l’application en question, est encensée dans cet article (qui par ailleurs se regarde le nombril), et ce à juste titre. C’est une appli formidable, mais l’hebdomadaire, dans une grande et perverse subtilité, en fait une critique dithyrambique (méritée) qui ne laisse aucun doute sur la véritable révolution « ClopClop » à venir.
Trouver des cigarettes à toute heure du jour et de la nuit, c’est super! Certes, mais était-il bien utile, messieurs les journalistes, de donner l’adresse internet du jeune studio de développement à l’origine de l’application iPhone (« disponible aussi sur Androïd », apprend-on), www.roosterapp.com ? On jurerait que l’unique objectif de cet ignoble article est d’envoyer illico-presto les lecteurs non-avertis télécharger au plus vite cette « véritable révolution » sur leur smartphones.
On soupçonne fortement le malheureux hebdomadaire, qui d’ailleurs ne publie que la semaine des quatre Jeudi, d’avoir des intérêts communs avec ce qu’il appelle « une véritable avancée sociale, voire un nouveau service public », ce qu’on jugera toutefois plutôt bien vu de sa part. Ou alors peut-être que le comité de rédaction aurait trop fumé? Ce n’est pas ClopClop qui s’en plaindra.